Le projet Solstice est constitué d’une série d’impressions photographiques représentant le littoral nord de la Bretagne. Le paysage y est peu à peu envahi par une dorure à la feuille.
Ce travail s’intéresse au phénomène naturel du solstice, instant charnière dans la temporalité humaine — nuit de pivot qui rassemble deux mouvements contraires d’obscurité et de lumière, de fin et de commencement. La longue nuit du solstice d’hiver s’étire dans une obscurité inquiète, nue, froide et souffreteuse — mais le sol glacé bourdonne déjà d’une vie prête au réveil ; et, dans la touffeur du solstice d’été, où la lumière et les fêtes s’attardent, les ténèbres s’annoncent déjà.
Au sortir d’un solstice, c’est une infinité de mondes qui se créent sur les ruines de ceux qui les ont précédés. La nuit, qui a demandé son tribut de souffrances et de cauchemars, et dont les ombres se métamorphosent en formes fantastiques — cette nuit d’enchantements donc, précède le renouveau du jour, rassurant, délimité, concret et sage, ainsi qu’un retour de l’activité humaine et, avec elle, de ses responsabilités. Le paysage maritime, comme la nuit, est sublime car insondable, empli de mystères — la mer elle-même tangue entre la lumière et l’ombre : nourricière et destructrice, berceau et tombeau, elle est indomptable, sauvage, brutale — mais aussi essentielle, et son équilibre se fragilise un peu plus chaque jour.
La mer a un visage mouvant, formé d’une infinité de motifs dont les combinaisons ne sont jamais semblables, habitée d’un mouvement pareil au balancement doré du soleil, ascendant et descendant, étreignant la côte pour s’en éloigner doucement, sous l’attraction d’un astre. Mer et ciel sont ainsi liés, rappelant à l’humain qu’il se doit d’être humble face à leurs puissances. De même qu’il ne peut posséder la mer malgré ses efforts destructeurs, l’humain est condamné à n’avoir du Soleil que des traces impalpables, à n’en saisir que des reflets terrestres — le soleil ni la mort ne peuvent se regarder fixement.
Il nous faut célébrer ces empreintes par la contemplation et non l’appropriation ; accepter notre infériorité face à la Nature, et ne pas désosser le spectacle éternellement neuf qui se déroule autour de nous. Jour après jour, l’air est envahi d’or, l’espace est rongé, déformé, habillé, baigné de lumière solaire. Au matin, le Soleil lie les mondes nouveaux-nés, éclats et cendres d’hier, par de minces filets d’or.
Tirages photographiques dorés à l’or